samedi 24 décembre 2022

Nouvelles espèces et climatoscepticisme

Ce matin, le pluviomètre de Labastide (iSalavas3) totalise 683 mm de précipitations pour 2022. Pour une commune des Gorges de l'Ardèche, on atteint à peine 2/3 de la normale de 1073 mm d'Aubenas, ville ardéchoise où il manque déjà 225 mm de pluie cette année.
En rive gauche de la rivière, le plateau connaît un déficit pluvieux de 25%, la rive droite est déficitaire de 35%. C'est la deuxième année consécutive où le département de l'Ardèche a connu que 845 millimètres de pluie.
La moitié de cette pluie est tombée en 3 épisodes extrêmes, assez tardivement, mais cela n'a pas sauvé les besoins de l'année 2022. Malgré les courtes inondations, coulées de boue, de plus en plus classées comme catastrophes naturelles, comme le sont aussi les mouvements de terrain à cause de la sécheresse.

 
Mesures départementales contre la séchersse (07) - Inondations à Saint-Marcel d'Ardèche
(source: Préfecture de l'Ardèche & Commune de St-Marcel)

Les rivières d'Ardèche suivent un régime de type Cévenol, avec des crues souvent violentes en automne ... Mais l'eau ne fait que passer dans les Gorges de l'Ardèche: pendant toute l'été, le bilan était légèrement négatif : la quantité d'eau sortant des Gorges à Sauze était plus petite que celle entrant à Vallon Pont d'Arc. La rivière a donc alimenté le karst de l'interfluve Cèze-Ardèche, tombé quasiment à sec au printemps, et ceci jusqu'à la fin d'octobre!


 
Vue panoramique de la Cèze aux Sources de Monteils
(photo: Nature-Témoin 10/2022)

Nous constatons l'effet de l'assèchement, mais aussi du réchauffement climatique sur les quantités de gaz carbonique sous terre. Par manque de gel prolongé, depuis au moins ces 8 derniers hivers, le dégazage des grottes commence de plus en plus tard. Ce dégazage ne se fera probablement plus du tout, comme nous avons pu le constater déjà l'an dernier dans plusieurs cavités.
La montée du taux de gaz carbonique atmosphérique se produit aujourd'hui à une cadence de 100x plus rapide que lors de la fin de la dernière glaciation.

Les extrêmes thermiques se présentent plutôt au-dessus qu'en dessous des normales. Si la météo attend -55°C en Amérique pour Noël 2022, aujourd'hui les gens étaient en T-shirt à la plage de Biarritz.
La seule journée de neige de l'année et les petites gelées à la mi-décembre réjouira peut-être les climatonégationistes autour de votre bûche de Noël. Ils diront certainement que la nature s'auto-corrige. Mais ce n'était qu'une vaguelette de froid. L'indicateur thermique national (ITN) de 2022 les calmera sûrement:

Selon les données d'Infoclimat 2022, cette année il y avait 112 jours avec 3° au-dessus des normes contre 8 jours de 3° en-dessous des normales 1981-2010.

Si la dégradation de la biodiversité à cause de l'influence anthropique ne fait aucun doute, il est aussi important de rapporter les bonnes nouvelles : 146 nouvelles espèces ont été décrites en 2022 et chaque découverte enrichit l'arbre du vivant.
Parmi les nouvelles espèces, les chercheurs recensent « 44 lézards, 30 fourmis, 14 limaces de mer, 14 plantes à fleurs, 13 étoiles de mer, 7 poissons, 4 coléoptères, 4 requins, 3 papillons de nuit, 3 vers, 2 scorpions, 2 araignées, 2 lichens, 1 crapaud, 1 palourde, 1 puceron et 1 oursin plat », décrit un communiqué.

Mais l'an dernier, sur 142 577 espèces étudiées par l'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN), 40 084 étaient menacées de disparaître et plus de 8722 reconnues comme « en danger critique.» Chaque année, c’est plus de 26 000 espèces animales et végétales qui s’éteignent à un rythme de 100 fois supérieur au rythme normal de disparition des vertébrés enregistré au cours des deux derniers millions d’années. La sixième extinction de masse est enclenchée.

Les humains survivront-t-ils à l’effondrement de la biodiversité ? Il semble évident que l’humanité soit imbriquée avec son écosystème. Si la biodiversité s’écroule, elle ne pourra évidemment plus assurer les services écosystémiques.
L’humanité peut-elle exister décemment dans ces conditions, si elle se positionne de plus en plus en mode d'auto-destruction et qu'elle ne pense qu'au profits d'aujourd'hui? Que penser d'une commission européenne qui ferme les yeux et laisse continuer le commerce du diamant russe à Anvers, pendant que la Belgique fait du lobby contre des sanctions, ou de nos gouvernements qui ne font pas taire les armes qui tuent chaque jour des milliers de gens? 
Malgré, la conscience collective qu'il faut commencer à vivre autrement et respecter les ressources de notre Planète, les efforts que nous avons tous effectués ces dernières années ont déjà été anéanties par les conséquences de la guerre. Que penser du redémarrage des centrales à charbon pour produire de l'électricité, pendant qu'on obligera bientôt qu'on achète un véhicule électrique? Laquelle on voit se recharger sur des aires de parking, le groupe électrogène qui tourne pendant que le chauffeur prend son picnic?
Le blabla de nos politiques et les promesses qu'ils font lors des COP ne restent que parole morte.

Malgré tout, on vous souhaite un joyeux Noël et une année 2023 pleine d'amour, de paix et de bonne conscience pour une transition écologique de façon intelligente !

mardi 6 décembre 2022

Bonne fête à la Salle du GASOiL !

Les tournesols qui fleurissent exceptionnellement au jardin me rappellent à la seule occasion où j’en ai vu en hiver. C’était à Massargues, à l’inauguration de l’entrée de l’Aven Flandin, où une dizaine de la sous-espèce Hélianthus annuus papicatuus poussaient autour de l’entrée.

Aujourd’hui, c’est la fête du Saint-Nicolas pour les belges. Mais pour les spéléos Gardéchois c’est la fête de la découverte de la salle du GASOiL du 6 décembre 2012, il y a exactement 10 ans.

C’était à peine trois semaines après notre première session de désob à la Grotte Flandin, le 17 novembre 2012, quand Raph Benini et moi avions commencé à élargir la cheminée. Juste au-dessus d'un rocher à enlever, il y avait du vide… Bonne nouvelle: le courant d'air partait dans la suite !

Quelques mois plus tôt, ou plutôt deux car réveillés par la nouvelle que le club d’Aubenas venait d’atteindre -50 à la Baume Flandin, Noë Vergez et Mickaël Leroy avaient revu la cheminée à la Grotte Flandin. Noë est arrivé à passer le coude jusqu'au bas de la cheminée. Ils jugaient l'état d'avancement 'assez important', vu le courant d'air et le fait que Noë ne manquait pas grand chose pour monter plus haut dans le noir.

Quelques années auparavant, Bernard Magos, curieux de savoir s’il y avait du vide, là où nous avions abandonné notre labeur à la massette en août 2008, y avait hissé sa caméra sur perche. En retirant le tout, sa lampe à coincé et son éclairage était resté condamné dans une anfractuosité, 5 m plus haut … Autant d’échecs que d’essais, après les spéléos d’Orgnac, Aubenas et Privas, début des années 2000 … le 12 octobre 2012 lors d’une réunion de ce qui allait devenir le GASOiL, nos spéléos décident de se mettre à la désobstruction de cette cheminée au-dessus du terminus à la Grotte Flandin, déjà entrevu lors de sa découverte en 1973 par les pionniers de la Section spéléologique d’Orgnac.

Autre petite anecdote: le 17 novembre 2012, sur les hauts de Massargues, nous étions accompagnés de Jean-Marie Chauvet (souhaitant aussi être présent pour la désob de la chatière verticale), Eliette Brunel, Jean-Pierre Giangiordano, Christian Haon, Salvator 'Dodor' Terres. Le programme était d'effectuer des essais de captage vidéo dans la salle des Colonnes, pendant que Raph et moi commencaient la désob au-dessus du Gour des Massues.
Nous avons cherché pendant une heure pour retrouver la grotte, car notre repère, le pylône de haute-tension à 50 m de l'entrée, venait d'être enlevé. Car quelques semaines auparavant, on avait enterré la ligne h.t. sous la route de Barjac... et tout le monde pensait retrouver l'entrée les doigts dans le nez!!
Finalement, la vidéo et la désob se sont faites, et c'est Dodor qui est allé mettre la tête là-haut en premier, pour voir le résultat de nos travaux.

Mais revenons au cadeau du Saint-Nicolas 2012 et nos 3 descentes successives à l’Escalade des Anorexiques ce jour-là, peu après la découverte de Salle de la Lampe(J) au-dessus de la Liposuccion Spontanée. Notre équipe d’exploration se confirmait par les participations régulières de Pierre Gerault, Noë et Mickaël, Stéphane Tocino, Alain Papillard et Catherine Madeuf, après la venue de Chrystelle et Myriam qui étaient très contentes d’avoir vu la grande salle mais ne préféraient pas passer jusqu’aux Massues à -29. A la place, elles nous préparaient d’excellentes soupes et clafoutis. Plus Raph et moi, c’était donc cette joyeuse dizaine qui s’occupaient du projet.

Ce matin du 6 décembre, en plein régime pré-Noël (par précaution: manger beaucoup moins de pain et de frites, boire davantage de rouge pour mieux absorber le gaz carbonique, dormir en position bras croisés espérant réduire la largeur de mes épaules) j'étais au marteau et burin en train d’élargir le soupirail au-dessus d’un évasement que Pierre agrandissait, quand je lui entendais prononcer les paroleshistoriques ERIK JE CRAINS QUE JE SUIS EN TRAIN DE PASSER, LA!!! Puis, on entendait un echo formidable en-dessous de nos pieds...

 

A peine sorti pour chercher de quoi à tirer, je redescends avec Myriam et sa copine, mais tout en bas je continuais seul pour rejoindre Stéphane pour agrandir, car ce n’était pas encore gagné et nos accus se vidaient vite. Vers 17h30, nous étions relayés par Mickaël et Raph avec les gros moyens. Ils élargissaient encore 3 étroitures dans le Puits du Lotus (les adeptes des forages en 400mm diamètre 8 sauront pourquoi on retrouve parfois des petits morceaux de papier rose collés partout !) En fin de soirée, Raph mit pied dans le vestibule de la future Salle du G.A.S.O.I.L.

C’était l’euphorie totale, après 8 sessions de désobstruction des 11 étroitures, mais on s’est arrêté là pour faire la première tous ensemble et on va donc tenir le cadenas fermé jusque lundi matin à 8h30 pour baliser, topographier, photographier. Ça laisse le weekend pour faire le planning et organiser les matos.

(mel de Mika) «… La voie est libre dans le puits! Raph est descendu en premier et se fut une belle surprise quand je l'ai rejoint. Enfin un trou qui ressemble à quelque chose!!! On est arrivé dans une belle salle d'environ 20 m de long sur 7 de large avec 5-6 m sous plafond. De superbes concrétions et de la calcite de partout. Penser à enlever les bottes et prévoir un balisage. Un grand gour limpide d'au moins un mètre de profondeur et plein de départ qu'on n’est pas aller voir. Prévoir de la corde et un peu de matos d'escalade pour voir les départs en hauteur lors des prochaines visites. Ne cherchez pas à me téléphoner, je vais me coucher je suis naz. Bravo, bonne soirée à tous et faites de beaux rêves de première... »